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Etablissements accueillant des personnes en situation de handicap et Covid-19, quelle réponse ?

Handicap

Le monde du handicap n’échappe évidemment pas à la crise liée au COVID 19 !

Les personnes en situation de handicap fragilisées par leur état de santé sont souvent plus vulnérables face à ce virus ; le confinement, synonyme de privation de liberté, génère de la frustration ; le changement brutal de mode de vie, au quotidien, imposé par le confinement est anxiogène ; tant de paramètres à prendre en compte tout en mettant en place une organisation visant à limiter les risques d’exposition au virus et assurer la continuité de service et d’accompagnement auprès de ces personnes.

Dès le début du confinement, le gouvernement a pris plusieurs séries de mesures pour accompagner les personnes, leurs proches aidants et les professionnels. Ce sont ainsi près de 150 000 enfants et adultes en situation de handicap dont les portes des externats ou accueils de jour ont fermé, avec la nécessité d’organiser la continuité de l’accompagnement à domicile. Parallèlement, les quelques 350 000 personnes en situation de handicap vivant au sein de structures d’hébergement ont dû s’adapter à des consignes de protection sanitaire, telles que l’interdiction des sorties collectives et des visites sauf cas exceptionnels.

Le confinement

Les structures qui accueillent des personnes en situation de handicap tout en tenant compte des consignes s’adaptent.

Dans les établissements où, même si chaque résident a sa chambre, il y a d’habitude beaucoup de vie collective, le souci principal a été et est toujours d’éviter l’intrusion de l’épidémie.

L’une des réponses est le confinement des résidents. Mais comment faire barrière lorsque les équipes se renouvellent constamment pour faire face aux absences et que de nouvelles personnes, potentiellement contaminées, rejoignent les équipes ?

Et quand la maladie est là, comment gérer pour éviter la diffusion de la maladie ? Comment annoncer un décès ? Chaque établissement, confronté à ces questionnements, en tension avec la réalité du handicap, tente de répondre au mieux face à cette crise.

Au sein de la Fondation John Bost, dès le 7 mars, les visites étaient arrêtées.

Depuis le début du confinement, dans les établissements de la Fondation, les règles diffèrent selon les sites, l'état de santé des publics accueillis, et la présence avérée ou non du virus, allant du confinement a minima au confinement le plus strict avec maintien des personnes dans leur chambre. La contrainte du confinement est particulièrement difficile à vivre pour ces résidents qui ont l’habitude de vivre dans des espaces ouverts.

Même si des activités individuelles sont proposées pour que les personnes hébergées ne se sentent pas complètement coupées du monde, la frustration, l'incompréhension et la perte de repères frappent durement ces personnes fragiles habituées à une assez grande liberté.

Les établissements de l’AEDE se sont également organisés pour faire face à la pandémie.

Afin d’éviter la circulation du virus, les résidents sont confinés et prennent leur repas dans leur chambre ou leur studio. Toutes les visites et sorties sont interdites.

Pour pallier le manque de contacts avec les proches, les professionnels organisent des visioconférences avec les familles. Pour faciliter ces échanges, maintien essentiel du lien, en cette période, des tablettes numériques ont été achetées. Pour empêcher le virus d’entrer, les entrées et sorties des professionnels, livraisons sont contrôlées avec la mise en place de sas. Dans chaque établissement, un espace de confinement a été mis en place pour accueillir tous les cas de suspicion de covid-19.

Les équipes socio-éducatives à rude épreuve

Il est difficile de travailler dans un contexte beaucoup plus contraint que d’habitude. De nouvelles consignes de sécurité sont à respecter et à faire respecter, tout en restant dans la bienveillance, avec des collègues différents en raison des nombreuses absences.

A la Fondation John Bost, chaque jour pendant plus d'une heure, une audioconférence permet aux directions de tous les établissements de croiser leurs informations et d'organiser la marche des services. Y sont évoqués les problèmes techniques, l'état des stocks et du matériel, la situation du personnel. Sur le site de la Fondation John Bost, la présence en permanence de médecins est assurée. Mais, les établissements ne fonctionnent actuellement qu'avec 60% des effectifs.

Au sein de l’AEDE, les directeurs partagent aussi leurs bonnes pratiques et mutualisent leurs ressources.

Pour faire face aux congés des collaborateurs, notamment celles et ceux qui ont la garde de jeunes enfants, plusieurs ont accepté d’effectuer des remplacements dans d’autres établissements. Ces aménagements se font uniquement sur la base du volontariat et pour des collaborateurs dont les établissements et services sont fermés depuis le 15 mars.

Ces bonnes volontés permettent, dans cette période de crise, d’assurer la continuité des accompagnements et la sécurité de chacun.

D’autre part, de belles initiatives voient le jour !

A l’AEDE, les Ateliers Brilane ont démarré la fabrication de surblouses avec l’aide d’une dizaine de bénévoles. (Voir article « Eclaircies »)

La Fondation des Amis de l’Atelier témoigne également d’une activité de production solidaire. Face à la pénurie de matériel de protection dans le secteur médico-social, un ESAT a redémarré son atelier couture pour équiper les Foyers, FAM et MAS de la Fondation des Amis de l'Atelier. Ainsi, depuis plusieurs semaines les équipes fabriquent des masques et des surblouses en tissu pour les professionnels de la Fondation. Fiers d'apporter leur contribution face à cette crise sanitaire, ils ont déjà confectionné plus de 3 400 masques en tissu et 130 surblouses lavables !

Comment s’adapter pour faire face ?

Faire face à ce défi est aussi un travail d’adaptation constant pour les cadres de direction. Les établissements se sont attelés à la tâche :

- Réorganiser les plannings de travail des équipes au quotidien pour tenir compte des absences mais aussi pour tenir compte de la présence des personnes 24h sur 24, en particulier dans les foyers qui accueillent des personnes qui sont au chômage partiel
- Encourager les équipes pour maintenir la motivation et l’enthousiasme alors que très vite la peur, le découragement et le manque d’idées peuvent surgir
- Former les personnels intérimaires
- Maintenir le lien de confiance avec les familles qui ne peuvent plus rencontrer les leurs
- Répondre à toutes les enquêtes et questionnaires des financeurs
- Mettre en place les consignes de sécurité à tous les niveaux
- Eventuellement répondre à la presse qui a besoin d’informations à communiquer
- Trouver les équipements de protection pour les équipes
- Réorganiser la maison pour mettre en sécurité les personnes non malades
- Se creuser la tête pour voir comment seront payés tous les surcoûts liés à l’achat de masques, gels mais aussi les embauches d’intérimaires
- Et puis bien sûr, maintenir le quotidien d’un établissement médico-social, comme toujours.

De même, les services administratifs et généraux sont à l’œuvre et méritent eux aussi un grand bravo : ils sont là, sur place – et non pas en télétravail – pour participer à la vie tellement spéciale de ces jours.

Le rôle de l‘aumônier prend, lui aussi, une nouvelle ampleur. La demande d’accompagnement, d’entretiens, de prière avec les résidents confinés est très présente. Les résidents ont vraiment besoin d’être rassurés, à plus forte raison quand il y a des décès.

Pour les personnes en situation de handicap dont les établissements ont fermé, la période de confinement est également difficile. Temps particulièrement complexe pour les familles d’enfants autistes et les personnes autistes adultes.

Des numéros d’accueil pour les personnes autistes, par exemple, ont été mis en place.

Les Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) ont aussi mis en place des actions tel un accueil téléphonique, un suivi à distance des demandes.

Alerté par les remontées du terrain, le gouvernement s’astreint à proposer des solutions (voir par exemple le communiqué du 4 avril 2020 visant à garantir l’accès aux soins des personnes en situation de handicap). Force est de constater que les réponses successives sont diffuses, parfois contradictoires, parfois déconnectées des réalités de terrain, et rendent la tâche ardue pour les établissements accueillant et accompagnant des personnes en situation de handicap.

A l’issue de cette crise, veillons à ce que chacun puisse à nouveau s’épanouir sereinement dans son lieu de vie.