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Une bibliothèque sous les bombes et l’espoir sous les décombres

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En Syrie on sait, ou on croit savoir, ce qu’il s’est passé. Mais nos représentations sont loin de la réalité. À Daraya, dans la banlieue de Beyrouth, après le massacre perpétré en 2012 par les forces du régime de Bachar el-Assad[1], dix mille habitants refusent de quitter la ville[2]. Un millier d’entre eux résiste activement pendant quatre années. Parmi eux Shadi – 19 ans – filme, d’abord avec son téléphone puis une caméra. Daraya est sous les décombres et l’armée poursuit ses raids meurtriers. Les images des barils d’explosifs lâchés par les hélicoptères, jusqu’à quatre-vingts par jour, font froid dans le dos. On éprouve la violence de la guerre…  mais comment des hommes peuvent-ils tuer leurs frères ?

Ceux de Shadi (ses sœurs et ses parents avec) transitent par Damas avant de fuir en Turquie. Shadi et ses amis restent. Rester c’est déjà résister. « Jusqu’au dernier jour, on a espéré… », un changement, une victoire, la paix. Pour ceux qui sont encore là, Shadi, Jihad et Ahmad conçoivent une bibliothèque secrète, au sous-sol d’un immeuble dévasté. Les milliers de livres exhumés des gravats de Daraya offrent de s’évader. De débattre. Ils ouvrent l’esprit et convoquent la raison.

On pleure avec ces jeunes quand ils enterrent un des leurs, on souffre avec Shadi quand un éclat d’obus traverse sa main, on remercie le ciel quand un autre se fiche dans la caméra qu’il porte autour du cou et lui épargne une blessure mortelle. On rit aussi. L’amitié est plus belle encore en temps de guerre.

Le film de Delphine Minoui, « Daraya, la bibliothèque sous les bombes[3] », a été présenté au Vieux Temple de Toulouse mercredi 7 février, en présence de Shadi. La soirée était organisée par l’Entraide Protestante de Toulouse et la Fédération de l’Entraide Protestante. Elles ont accueilli ensemble Ghassan, Shamsa et leurs quatre enfants en 2020. Ils étaient là aussi. La petite famille syrienne, qui (sur)vivait depuis huit ans dans un camp au Liban, est accompagnée depuis son arrivée, à Viane[4], par Christophe, Nicole et plusieurs bénévoles. L’exposition photos « Nés quelque part » qui relate son parcours, signée Pierre Clot, ajoutait encore à la qualité du propos[5].

Le public, touché, a posé de nombreuses questions à Shadi. Le jeune homme réside aujourd’hui à Paris. Il est journaliste et spécialiste du Moyen-Orient et espère obtenir la nationalité française prochainement. « Je suis très émue quand je vois le parcours de ce jeune homme et la souffrance de tant d’autres qui n’ont pas eu sa chance. Je me suis rapprochée de la FEP[6] pour savoir comment je pourrais contribuer à mon niveau » confie Sylvie au sortir du Vieux Temple.

L’exposition photos itinérante de Pierre Clot et le film de Delphine Minoui sont à la disposition de tous les adhérents qui souhaitent programmer une rencontre dans leur région. La FEP se tient à leurs côtés pour organiser l’événement. Contact : refugies@fep-est.fr et Sophie de Croutte 07 64 73 46 58.

Brigitte Martin

[1] Du 20 au 25 août 2012, des bombardements aériens suivis d’un assaut des forces gouvernementales dans la banlieue sud-ouest de la ville font sept cents morts, dont des femmes et des enfants.
[2] Daraya comptait deux cent mille habitants avant la révolution.
[3] « Daraya, la bibliothèque sous les bombes », documentaire de Delphine Minoui, coréalisé avec Bruno Joucla, avec la collaboration de Shadi Matar, Grand Prix et prix du Jury jeunes du 26e festival du grand reportage et du documentaire de société (Figra).
[4] Viane est un village du Tarn (81). Aujourd’hui la famille est installée à Castres.
[5] L’exposition photos est visible aux Vieux Temple jusqu’au 21 février.
[6] La Fédération de l’Entraide Protestante organise l’accueil citoyen de Syriens par le biais des Couloirs humanitaires, voie d’accès légale et sûre mise en place dès 2015 par le gouvernement français. Son guide pratique à destination des collectifs d’accueil et sa plaquette de présentation des Couloirs humanitaires sont en accès libre sur fep.asso.fr


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