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La leçon du gobelet en plastique, un article de Proteste numéro 174

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Silvère Lataix a été coordinateur du réseau Bible et Création. Soutenu par l’EPUdF[1], il a pour objet de réfléchir à la prise en compte des enjeux écologiques.

L’expression « développement durable » est un anglicisme à la traduction approximative – « développement soutenable » serait plus exact – mais elle a le mérite d’être assimilée par le grand public qui voit d’emblée de quoi on parle. Nombreux sont ceux qui pensent que le développement ne peut pas être durable car la croissance n’est pas infinie.

Sauver la planète, c'est vague !

À l’Entraide protestante de Lyon, qui compte aujourd’hui soixante-dix salariés, nous avons amorcé une démarche de responsabilité environnementale. On entend partout qu’il faut sauver la planète, ce qui peut être assez désespérant et créer une éco-anxiété parce que, seul, on n’a pas les moyens de sauver la planète. Mais, en tant que chrétiens, nous sommes porteurs d’espoir puisque nous avons le privilège de connaître le Sauveur. Et si on connaît le Sauveur, on n’a pas besoin de jouer les sauveurs. Ça nous ôte un poids énorme, même si on doit respecter la création qu’Il nous a donnée.

Je fais partie du groupe de travail qui propose une démarche verte au sein de l’entraide. Fondamentalement, je pense que l’entraide est le lieu où parler de ces questions. Sauver la planète reste une option très vague pour bien des gens, un truc de bobos qui s’ennuient. Au sein de l’entraide, on touche les personnes qui s’intéressent le moins au développement durable, parce qu’elles sont davantage préoccupées par la façon dont elles vont boucler leur fin de mois, mais qui sont les plus affectées par le changement climatique.

Avec des petites gouttes, on peut provoquer un raz-de-marée. Prenons l’exemple du gobelet en plastique pour le café. On veut se renouveler, contribuer à la justice climatique, prendre en compte les enjeux, et donc on supprime les gobelets en plastique. Tout le monde se félicite. C’est un premier pas à la portée hautement symbolique. Mais on peut mieux faire. Comment on se renouvelle ? En essayant de convertir les gens.

La conversion écologique, un premier pas

La pause-café est éminemment propice à la discussion. Si la question de l’usage ou non du gobelet en plastique n’a en soi pas grand intérêt, elle permet d’aborder des sujets essentiels dans la bonne humeur, sans braquer personne. On réfléchit soudain à ce café qui vient du bout du monde, à l’impact du transport des précieux grains, aux personnes qui ont travaillé dans les caféières, à la répartition entre les cultures vivrières et d’export, à l’épuisement des sols… On peut aller très loin. Quand une conversion écologique est amorcée, quand les personnes sont convaincues, on peut viser des objectifs plus ambitieux : contrats d’énergie, politique d’achat…

La réflexion est intellectuelle mais il y a aussi une rencontre spirituelle. Voilà deux mille ans que Jésus est venu délivrer son message, renverser les valeurs. Il serait temps de se renouveler et de le mettre en pratique. Finalement, moi le premier, on a du mal à intégrer le message. La foi personnelle est importante, il faut nous mettre en marche, même si on n’a pas toutes les cartes en main. C’est la première étape. Les disciples ont décidé de suivre Jésus ; ils ne savaient pas exactement ce qu’ils allaient faire, mais ils se sont mis en marche.

Dans Un taxi pour Tobrouk[2], Michel Audiard met dans la bouche de Maurice Biraud cette pensée que j’ai fait mienne : « Deux intellectuels assis vont moins loin qu’une brute qui marche. » Si on tergiverse trop longtemps… on ne bouge pas.

Propos recueillis par Brigitte Martin

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[1] Église protestante unie de France.

[2] Film français réalisé en 1961 par Denys de la Patellière.