Les Entraides protestantes sont « nées de nouveau » dans les années 70-80 du siècle dernier, afin de lutter contre les formes de pauvreté et d’exclusion en train de s’installer et de participer au combat de la société civile confrontée aux insuffisances de la protection sociale. Bien d’autres associations – catholiques, laïques – ont développé alors de nouvelles activités. Certaines se sont données une ou des spécialités (aide alimentaire, vestiaires, accueil, appui administratif, accès à la santé, hébergement ….), d’autres pas. Quel schéma retenir ?
Les Entraides protestantes, avec leur culture de l’autonomie locale, n’ont pas reproduit un modèle mais ont essayé de répondre à des besoins identifiés et parfois non-pris en charge sur leur territoire. L’autre facteur de cette diversité d’initiatives est certainement celui des compétences des bénévoles engagés. Chaque association a répondu en fonction des envies et des capacités des personnes présentes. Et pourquoi pas !? Il n’est pas possible d’apporter une réponse univoque à la question : faut-il se spécialiser ? Il faut ajouter que dans les trente dernières années, certaines des Entraides qui se sont spécialisées se sont aussi professionnalisées. La capacité d’innover des administrateurs, comme la nécessité de se conformer à des contraintes techniques, ont pu conduire à cette spécialisation. Une spécialisation qui en fait souvent des opérateurs de politiques publiques. Cela n’est pas une tare, même si cela nous éloigne un peu du discours sur « la diaconie interstitielle » qui a été promu pendant longtemps et qui invitait à être présent là où les collectivités et les autres n’étaient pas.
Quel rôle pour les entraides ?
Quels rôles ont pu jouer et peuvent donc jouer les Entraides protestantes sur leurs territoires, en rapport avec cette question de la spécialisation ? Il me semble qu’une des responsabilités que les Entraides ont assumé et doivent continuer à assumer, c’est d’être des animateurs de partenariats locaux. La place des protestants, minoritaires bien acceptés, leur donne une sorte de légitimité à réunir des associations parfois concurrentes et à construire avec elles des réponses articulées sur un territoire. Les Entraides ne peuvent être soupçonnées de vouloir prendre toute la place, elles peuvent aider à ce que chacun, petit et gros, soit au service de tous. Il peut arriver que cela conduise à des spécialisations, ce qui importe alors c’est la circulation et la coopération entre les acteurs. Il peut arriver aussi que deux associations offrent des services approchants, ce qui importe c’est que la personne en difficulté ne soit pas mise en demeure de choisir mais puisse exercer là au moins sa liberté.
Une spécialisation pour les Entraides protestantes
Il y a quand même une spécialisation à laquelle devrait tenir toutes les Entraides, c’est celle de la qualité de l’accueil et de l’accompagnement, appuyée sur la formation des bénévoles et la participation des personnes accueillies. Le nom de nos associations « Entraides » plutôt que « Secours » ou « Assistance » devrait nous obliger. La culture protestante de l’éducation populaire et de l’égale dignité de chacun devant Dieu (et les autres) devrait nous inciter à imaginer de nouvelles formes de participation des personnes accueillies.
Olivier Brès,
Président du comité national de la Mission Populaire