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Découvrez le portrait d’une femme engagée : Soledad André, coordinatrice de terrain pour les Couloirs humanitaires

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Soledad André est coordinatrice de terrain pour les Couloirs humanitaires. Elle accompagne des personnes réfugiées au Liban dans leur demande d’asile en Europe.

Au sortir de Sciences Po Bordeaux, Soledad part en Jordanie apprendre l’arabe. D’origine martiniquo-palestinienne, c’est de sa mère qu’elle a hérité son intérêt pour le monde arabe. De retour en France, elle réussit des concours de la fonction publique mais son cœur est resté au Proche-Orient.

Soledad veut travailler « pour l’intérêt collectif ». C’est sûrement à son père, engagé en politique, et à sa grand-mère, bénévole pendant quarante ans au Secours populaire, qu’elle doit cette aspiration. La jeune femme a vingt-six ans quand elle arrive au Liban en 2016, chargée d’un programme de soutien scolaire aux enfants syriens et libanais porté par l’AFD1. Soledad se plaît au Liban. Elle y découvre des similitudes avec la Martinique ; la spontanéité des relations, la mer, la nature… À Beyrouth, « on rencontre des personnes d’horizons divers », l’offre culturelle est abondante…

Mais le Liban, c’est aussi un État défaillant, le racisme, notamment envers les réfugiés2, les rixes entre milices : « Ces dernières années, la situation s’est considérablement détériorée. On a parfois la sensation qu’un simple accrochage peut tout faire basculer. » À partir de 2019, la crise économique provoque la dégradation des infrastructures, des pénuries tous azimuts, des coupures drastiques d’électricité… L’appauvrissement de la population est tangible. Malgré tout, dans ce contexte très préoccupant, « les gens développent une forme d’entraide ».

Depuis 2018, Soledad travaille pour la Fédération de l’Entraide Protestante. Elle participe à la mise en œuvre des Couloirs humanitaires qui démarre avec la FCEI3. Des ONG présentes au Liban4 signalent des cas de réfugiés, principalement syriens. La petite équipe de la FEP les rencontre et évalue leur vulnérabilité. S’ils répondent aux critères du projet, Soledad les accompagne dans leur demande de visa et assure la coordination avec la France pour organiser leur départ.

En 2020, la pandémie contraint les Italiens à plier bagage ; la jeune Française se retrouve seule pendant huit mois. Débordée, elle tire la sonnette d’alarme. La FEP recrute Félicie Dhont qui la rejoint en 2021. Au début du conflit, de nombreux Syriens fuyant la guerre obtenaient une protection lorsqu’ils demandaient l’asile en France. « Depuis quelques années, c’est bien plus difficile. Pour certains, la guerre est terminée en Syrie et les Syriens peuvent rentrer chez eux, ce qui est contredit par de nombreux rapports et témoignages. » De son côté, le Liban durcit sa politique et organise le retour forcé des Syriens. La situation des réfugiés se dégrade et personne ne s’en émeut.

En 2023, « la Syrie n’est plus sur le devant de la scène et personne ne parle de la situation au Liban… J’ai l’impression qu’il y a une mise en concurrence entre les victimes de conflits… C’est difficile à vivre pour nous qui travaillons sur le terrain. » Soledad et Félicie organisent moins de départs. En France, la FEP a du mal à trouver des collectifs citoyens pour accueillir les réfugiés5. Les situations sont parfois dramatiques : « Nous avons une famille avec un enfant handicapé en attente depuis 2019, il est très difficile de leur trouver un accueil. Je ne sais plus quoi leur dire. »

Malgré les écueils, Soledad, convaincue de la nécessité de programmes tels les Couloirs humanitaires, mesure la chance qu’elle a de faire ce métier. « En Europe, on observe un repli identitaire et une instrumentalisation de la question des réfugiés. Il est important de rappeler notre responsabilité dans l’accueil des populations vulnérables et de garantir davantage des voies d’accès à l’asile légales et sûres. »

Brigitte Martin

Article extrait de la revue Proteste 175

 

1 Agence française de développement.
2 Le nombre des réfugiés syriens au Liban aurait dépassé les deux millions. La majorité est dans le tissu urbain, dans des quartiers
très pauvres. D’autres sont dans des camps, sous tentes, dans des conteneurs, ou dans des bâtiments vétustes s’apparentant à des
bidonvilles.
3 Fédération des Églises protestantes italiennes (Federazione delle Chiese Evangeliche in Italia).
4 La FEP a édité un guide pratique des collectifs d’accueil pour tous ceux qui accueillent ou désirent accueillir avec les Couloirs humanitaires : https://fep.asso.fr/wp-content/uploads/2023/06/02062023-Livret-Accueil-de-letranger.pdf
5 Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, la Croix-Rouge internationale, le Centre libanais des droits humains, l’International Refugee Assistance Project.



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