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3 questions à Florian Grill, président de la Fédération française de rugby

Médias

Réélu avec 67 % des voix à la présidence de la Fédération française de rugby, Florian Grill milite pour un rugby éducatif, citoyen et féminin.

 

La FFR, une fédération à missions, de quoi s’agit-il ?
Dans le cadre de notre délégation de service public, notre rôle n’est pas uniquement sportif. Il est aussi éducatif et citoyen. Éducatif, parce que le rugby véhicule des valeurs cardinales comme le respect de l’adversaire et de l’arbitre. Citoyen, parce qu’il y a plus de deux mille clubs en France – et dans certains villages, le club du rugby est plus important que le bureau de poste – qui développent de sections de rugby dédiées à des causes citoyennes.
Il y a le rugby adapté pour des adultes ou des enfants en situation de handicap, le rugby santé pour des gens malades et notamment le jeu à cinq sans choc ni plaquage pour des femmes atteintes de cancer du sein (1), le rugby job dating pour faciliter le retour à l’emploi (2) et aussi le rugby au pied des immeubles, dans les quartiers prioritaires, qui attire beaucoup de femmes.
Le rugby ne transforme pas que des essais, il transforme aussi des personnes. C’est peut-être à cause de mon éducation protestante ou parce que je suis entrepreneur que j’aime l’idée de donner du sens. Le sens et la performance ne sont pas antinomiques, le supplément d’âme conduit à plus de résultats.

Le rugby se décline donc aussi au féminin ?
Bien sûr ! Nous avons aujourd’hui 13 % de femmes, soit un peu plus de quarante mille licenciées, un chiffre en constante progression. Nous visons les cent mille. Quand on mène des actions dans les quartiers sensibles, 45 % des jeunes filles viennent à nous. Le rugby est un moyen d’émancipation pour les femmes, elles gagnent en indépendance et suscitent le respect parce qu’elles impressionnent tout le monde par leur pratique. Coumba Diallo,
ancienne internationale et capitaine de l’équipe de France, maintenant élue au comité de la FFR, est issue d’un quartier et raconte volontiers comment  le rugby a été pour elle un ascenseur social.
La cible féminine est une priorité, nous avons une vraie stratégie d’augmentation de la pratique des femmes. Le rugby est un sport comme les autres que les femmes pratiquent très bien. On les accompagne en travaillant à la création de vestiaires féminins ou à la médiatisation de l’équipe de France féminine ou de l’Élite 1, la première division féminine. L’appétence des gens est croissante pour le rugby féminin. Nous avons battu le record du monde pour un match féminin aux Jeux olympiques avec soixante-sept mille personnes dans le stade !
À l’école de rugby, l’apprentissage du contact est très progressif. Le rugby qu’on regarde à la télé n’a rien à voir avec ce qui se pratique dans les écoles. Le rugby à cinq se joue en mixité et jusqu’à soixante-dix ans ! Hélas, le rugby est confronté aux problématiques de la société liées à la consommation de drogue et d’alcool. Pour autant, les clubs accompagnent des parcours de vie et mènent des actions éducatives et sociétales remarquables.

La féminisation du rugby apporte-t-elle des changements ?
La présence des femmes change l’état d’esprit d’un club. On peut reprocher au rugby son côté « entre hommes » mais quand un club développe le rugby à cinq mixte, ça fait beaucoup de bien à tout le monde parce que la vraie vie est mixte ! Les femmes ont envie de faire du rugby, les clubs doivent devenir mixtes. La féminisation du rugby doit passer par un nombre accru d’encadrantes, de dirigeantes et de femmes arbitres. Le défi est énorme !
Au comité de la Fédération, on a 50 % de femmes, ça booste ! L’ouverture du rugby aux femmes est un marqueur important de transformation sociétale. Le rugby crée des rapprochements, offre des lieux de fraternité. Il n’y a plus beaucoup d’endroits où les gens de toutes les générations, de tous les milieux sociaux et de toutes les religions se mélangent. S’il y avait plus de rugby dans la société, elle pourrait mieux se porter.

Propos recueillis par Brigitte Martin

 

Un article extrait de Proteste, numéro 180 dont le dossier est consacré la place des femmes dans l'action sociale (pour découvrir ce numéro cliquer ICI)

 

(1) Les mouvements qui font travailler le haut du corps des femmes atteintes d’un cancer du sein augmentent leurs chances de rémission.
(2) Demandeurs d’emploi et entrepreneurs jouent ensemble dans l’anonymat. À l’issue du match, l’anonymat est levé et des entretiens sans CV sont proposés, en tenue de sport (plus de 60 % de promesses d’embauche).