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Mobilisation de la FEP et de ses membres pour l’inclusion des personnes exilées dans la réponse à la crise du Covid – 19

Accueil de l’étranger

La crise sanitaire qui ébranle notre société nous rappelle de façon dramatique que l’ensemble des personnes vivant sur le territoire français partage un destin commun.

Des députés de l’Assemblée Nationale jusqu’aux personnes migrantes vivant dans les campements de Calais, nous faisons tous face au même virus. Il est nécessaire de garantir la santé de chaque personne sur le territoire pour assurer la santé collective. Alors comment, dans un contexte où le plus sûr moyen de protéger les autres est de rester chez soi, s’assurer de la prise en charge des plus démunis ? Comment s’assurer que les personnes exilées, dont certaines vivent dans des campements ou dans la rue, sans possibilités de respecter les gestes barrières et sans accès à l’information, ne soient pas laissées en dehors de la réponse nationale à la crise ?

La FEP se mobilise avec ses membres, en appuyant leur travail de terrain continu et par une interpellation forte des pouvoirs publics pour l’inclusion des plus vulnérables.

A la suite de l’annonce des premières mesures de confinement, certaines associations ont fait le choix cohérent de suspendre leurs activités, ne pouvant garantir à leurs salariés et bénévoles des conditions de travail saines et une prise de risque raisonnable, dans l’objectif de mieux se préparer pour agir par la suite. C’est le cas de l’Echoppe du Diaconat protestant de Grenoble, qui a fermé pendant deux semaines pour se réorganiser.

D’autres associations ont choisi de maintenir les activités répondant aux besoins essentiels des personnes exilées : distribution de nourritures, de chèques alimentaires, ou accès à des services d’hygiène et à l’information concernant les droits des personnes exilées et la prévention sanitaire.

L’Armée du Salut, en partenariat avec d’autres associations, distribue par exemple 5 000 paniers-repas par jour à Paris. La Cimade, de son côté, s’est rapidement organisée pour analyser les conséquences de la crise sur le droit des étrangers[i] et informer au mieux les personnes exilées, à travers ses groupes locaux en région.

Les associations à l’ancrage territorial plus marqué jouent un rôle important dans la fourniture de services essentiels, comme l’ont démontré les échanges au cours de la rencontre en ligne des entraides le 26 mars 2020[ii]. Le Diaconat de Nantes, par exemple, a renforcé la distribution alimentaire bimensuelle en passant à un rythme hebdomadaire et en couplant les distributions à des permanences pour l’accès à l’information concernant le droit des personnes et la prévention face au coronavirus. L’association l’Etage à Strasbourg a lancé l’opération "toilettes ouvertes" pour garantir l’hygiène des toilettes publiques, avec des commodités dont l’accès se fait via un parcours spécifique, encadré par des barrières.

Dans le cadre du projet d’hébergement citoyen des couloirs humanitaires, une communication, par e-mail et message vocal à destination des collectifs d’accueil et des personnes accueillies, a été envoyée en arabe et en français pour informer les personnes de la situation de crise sanitaire et des mesures de prévention et de confinement à respecter ; une rencontre en ligne avec l’ensemble des collectifs est également prévue pour partager conseils et informations. Le Réseau Esaïe, qui coordonne l’hébergement citoyen de mineurs non accompagnés au Diaconat protestant de Grenoble, continue ses activités, les personnes étant confinées chez les hébergeurs.

Ces initiatives ne sont que des exemples des actions de solidarité développées par les membres de la FEP, qui sont tellement nombreuses qu’elles ne peuvent malheureusement pas toutes être citées[iii]. Elles permettent, à leurs échelles respectives de répondre aux besoins essentiels des personnes et sont soutenues par la plate-forme en ligne développée par la FEP.[iv]

Elles ont cependant besoin d’être soutenues par une action forte de l’Etat, afin d’être mieux coordonnées et complétées par des dispositifs publics de réponse aux besoins immenses de mise à l’abri sur le territoire et de protection des droits des personnes exilées durant la crise sanitaire.

Interpellation nationale

Très tôt les associations d’aide aux personnes en situation de précarité et aux personnes exilées ont alerté les pouvoirs publics sur la nécessité de ne laisser personne de côté dans la crise que nous traversons.

Une large coalition d’acteurs, incluant la FEP, se mobilise auprès du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et des pouvoirs publics pour défendre les droits des personnes exilées. Cette mobilisation a déjà permis de prévoir des mesures spécifiques dans le cadre des ordonnances Covid – 19, notamment pour le maintien des droits des personnes pendant le confinement. Ainsi les visas long séjour valant titre de séjour, tous les titres de séjour et les récépissés expirant entre le 16 mars et le 15 mai 2020 sont prolongés pour une durée maximale de 180 jours, et en pratique la plupart des préfectures ont annoncé une prolongation pour trois mois.

Nous avons également demandé très rapidement la mise en place d’une cellule de crise permettant un dialogue franc et direct avec la direction générale des étrangers en France (DGEF) du ministère de l’intérieur. On peut le remercier pour la mise en place rapide de cette cellule de crise, à laquelle la FEP, ainsi que la Cimade et le Centre d’Action Sociale Protestant, participent. La FEP a par ailleurs incité le ministère de l’intérieur à demander à l’ensemble des préfets la prise en charge et le soutien des personnes précaires pendant l’épidémie en :

- garantissant la mise à l’abri par l’accès à l’hébergement des personnes à la rue, quel que soit leur statut, et la prescription de toute remise à la rue de demandeurs d’asile, déboutés ou réfugiés ;
- clarifiant les mécanismes de coordination départementale des actions, dont le pilotage est confié aux directions régionales et départementales chargées de la cohésion sociale ;
- maintenant des actions de veille et de repérage des ménages à la rue ;
- clarifiant la question des déplacements dérogatoires pour les salariés, bénévoles et bénéficiaires, et demander aux forces de l’ordre de faire preuve de discernement et de tolérance vis-à-vis des personnes dans l’impossibilité de produire une attestation justifiant leur déplacement ;
- permettant l’accès à l’eau, aux sanitaires et aux mesures d’hygiène.

Les associations sont également encouragées à faire remonter à la DGEF les situations problématiques via l’adresse e-mail dédiée (asile-covid19-dgef@interieur.gouv.fr).

Les différentes mesures prises sont évidemment à saluer. La FEP demeure cependant déterminée à continuer à alerter les pouvoirs publics sur la nécessité d’assurer une protection complète des personnes exilées et des personnes vulnérables face à certaines situations qui restent inacceptables.

Mobilisation locale

Ainsi d’un point de vue opérationnel, il est important de continuer à demander une mise à l’abri urgente des personnes : si en région parisienne de gros efforts ont été fournis, la situation reste très problématique dans beaucoup de territoires. Cette mise à l’abri doit également se faire dans des conditions permettant le respect des mesures d’hygiène et des gestes barrières pour se prémunir du Coronavirus.

En parallèle de la mise à l’abri, il est nécessaire de prévoir un dispositif d’information au plus près des personnes exilées, utilisant leurs canaux habituels d’information (radio de la diaspora, groupes Facebook etc.), avec des outils adaptés et élaborés avec elles, que ce soit concernant les mesures gouvernementales ou les gestes barrières[v].

Il est également nécessaire de maintenir l’enregistrement des demandes d’asile en préfecture, qui sont malheureusement suspendues dans nombre d’entre elles, non par instruction du ministère mais par manque de personnels, notamment en raison de la mise en place d’un enregistrement dématérialisé. Nous devrons observer une vigilance particulière concernant les mineurs non accompagnés qui souhaitent enregistrer une demande d’asile avant leur majorité, et garantir des conditions minimales de subsistance aux personnes qui ne vont pas pouvoir s’inscrire dans la procédure, en mettant en place un dispositif d’urgence.

Il faut aussi continuer à alerter sur le maintien des assignations à résidence et l’obligation de pointage des Dublinés, qui doivent faire de longues distances dans certains cas.

Enfin le délai de carence de trois mois pour l’aide médicale doit être a minima suspendu pendant la crise sanitaire.

Pour accompagner ces mesures, les associations, partenaires essentiels, doivent pouvoir fournir à leur personnel les équipements de protection nécessaires : beaucoup d’entre elles ont eu recours à des solutions alternatives, mais un approvisionnement massif de la part des pouvoirs publics est nécessaire.

Ces actions fortes, sur le terrain et dans l’interpellation des pouvoirs publics, illustrent la mise en œuvre d’une solidarité exemplaire des associations de la FEP et l’extraordinaire engagement de l’ensemble des acteurs associatifs qui interviennent auprès des plus démunis. Il faut souligner cet engagement sans faille qui joue un rôle clé dans la prise en charge et la prévention sanitaire pour les personnes en situation de grande précarité dans le cadre de la crise que nous traversons. C’est peut-être cet engagement qui permettra d’éviter un drame sanitaire encore plus important. De par sa nature associative, il a besoin d’être soutenu opérationnellement et appuyé politiquement par les pouvoirs publics, et c’est précisément le rôle de la FEP que de s’en assurer.

[i] Voir deux articles intéressants de la Cimade : https://www.lacimade.org/conseils-pratiques-et-demarches-administratives-possibles-par-temps-de-confinement/ et https://www.lacimade.org/etat-durgence-sanitaire-analyse-des-ordonnances-covid-19/

[ii] Voir le compte rendu de la rencontre

[iii] Se référer au compte rendu pour une liste des actions mise en œuvres

[iv] Lien vers la plate-forme d’informations et e ressources de la FEP https://fep.asso.fr/covid-19-plateforme-dinformations-et-de-ressources/

[v] Voir la rubrique Outils à destination des personnes et associations accompagnant des personnes exilées  : https://fep.asso.fr/impact-de-la-crise-sanitaire-sur-la-situation-des-personnes-exilees/

 



Pour aller plus loin